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Un Passeport pour les Compétences

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Promis depuis 20 ans, le passeport de compétences devrait enfin être disponible pour tous les actifs français dans les premiers mois de 2023. De quoi s’agit-il ? D’une sorte de CV officiel, recensant diplômes, expériences et compétences avérées, accessible pour chacun en ligne depuis son compte personnel de formation (CPF). Un outil « officiel » qui ne remplacera pas les solutions digitales RH les plus performantes en la matière, mais qui pourrait les compléter avantageusement.

Le passeport de compétences : un CV certifié

Envisagé par les partenaires sociaux dès 2003, créé dans son principe en 2009, intégré virtuellement au CPF à la création de celui-ci en 2015, le « passeport d’orientation, de formation et de compétences » est longtemps demeuré à l’état de promesse. Depuis que le CPF est devenu accessible de tous les smartphones et PC, fin 2019, il est techniquement possible de mettre en œuvre le passeport de compétences. La Caisse des Dépôts, qui gère l’interface numérique CPF, s’est attelée à la tâche et a annoncé une mise à disposition du côté d’avril 2023.

L’intérêt du passeport de compétences est qu’à la différence du CV, il n’est pas purement déclaratif. Les données qu’il contient proviennent de sources sûres et officielles.

Que contient-il ? Il est structuré en trois parties :

  • Une partie « expérience professionnelle ». Elle devrait être alimentée par des données RH récupérées directement des DSN, c’est-à-dire des déclarations mensuelles aux organismes sociaux issues du SIRH de l’entreprise. On y trouvera également les validations des acquis de l’expérience (VAE).
  • Une partie « formation initiale », qui contient les diplômes acquis au cours des études. Les données proviennent directement des institutions qui émettent ces diplômes.
  • Une partie « formation continue » avec tous les titres officiels obtenus dans le cadre de la formation professionnelle. Ces informations, là encore, seront transmises automatiquement par les certificateurs.

Il inclut également le "passeport de prévention", qui intègre toutes les certifications et habilitations obtenues par le bénéficiaire en matière de santé et sécurité au travail.

On perçoit donc tout l’intérêt de passeport : à la différence d’un CV, qui peut être facilement « arrangé » voire falsifié, ce document ne contient que des informations sûres et avérées. C’est une sorte de CV officiel et infalsifiable. Une fonctionnalité d’intégration au profil LinkedIn (ou d’autres réseaux sociaux professionnels) sera vraisemblablement développée : loin de se concurrencer, les deux outils se complètent efficacement.

Quelle utilité pour l’entreprise et son responsable formation?

Pour l’employeur, l’utilité du passeport formation ne fait pas de doute. En phase de prospection de candidats, la recherche des profils s’appuiera sur un cœur d’informations solides. En phase de recrutement, plus besoin de vérifier les données du CV, et plus de mauvaise surprise a posteriori. En matière de gestion digitale des compétences et des parcours, à l’échelon individuel et collectif, pour peu que les conditions de compatibilité soient au rendez-vous, le passeport pourrait faciliter considérablement la récupération et l’analyse des données des collaborateurs.

Autre point important : la partie « passeport de prévention » du passeport de compétences peut aider le service RH et/ou le manager à assurer le suivi des obligations en matière de formation santé/sécurité.

On devine donc trois contextes principaux dans lesquels les RH pourront trouver un avantage à cette nouveauté :

  1. Le recrutement ;
  2. La gestion individuelle des parcours ;
  3. La gestion globale des compétences.

Il y a cependant deux bémols, ou plutôt un bémol et une précaution.

  1. Le bémol, c’est que le passeport de compétences est confidentiel. Son bénéficiaire peut choisir de le partager, mais il n’y est pas obligé. Pour l’individu, le passeport de compétences a deux utilités possibles : il l’aide à faire le point sur sa carrière, à titre personnel ; et il peut l’aider à communiquer sur son parcours. Tout dépendra donc de l’usage qui s’imposera parmi les salariés et les candidats. Quelle proportion d’entre eux choisiront de diffuser leur passeport de façon publique et/ou auprès de leur employeur ? Entre le souhait de conserver la maîtrise de ses données et celui de rassurer l’entreprise, quelle tendance l’emportera ? Il est encore beaucoup trop tôt pour le dire.
  2. La précaution indispensable à prendre, c’est bien sûr d’éviter de prendre ce CV certifié pour un résumé objectif de son détenteur. Le passeport de compétences ne liste que des faits objectifs, institutionnels. Il ne dit rien de la façon dont l’individu travaille, communique, s’insère dans un collectif… Et il ne prédit en rien ses performances futures. Il ne faudrait pas que le passeport de compétences vienne aggraver ce mal dont les entreprises françaises étaient plutôt en train de guérir : la surévaluation du diplôme par rapport à l’expérience.

Quelle complémentarité avec les outils de l’entreprise?

Les autres outils à la disposition des RH pour gérer les talents restent donc plus que jamais indispensables : tests de personnalité, analyses via l’intelligence artificielle, entretiens… – et bien sûr l’expérience humaine du professionnel RH.

Si toutes les conditions sont réunies, si le passeport de compétences tient bien ses promesses techniques, et si les collaborateurs et les candidats se l’approprient et décident majoritairement d’en faire un outil de promotion de leur parcours, d’importantes synergies et complémentarités pourront se mettre en place avec les outils digitaux de l’entreprise. Reprenons les 3 contextes évoqués ci-dessus.

  1. Le recrutement: les informations issues des passeports de compétences pourront enrichir les bases de données utilisées pour établir, via l’intelligence artificielle, les profils de compétences des candidats et présélectionner les plus pertinents. Rappelons que le passeport ne comprend pas uniquement les diplômes, mais aussi l’expérience professionnelle et les formations continues. Les chatbots intervenant dans le processus de recrutement, par ailleurs, pourront faire l’économie de certaines questions et orienter la conversation en fonction des données du passeport.
  2. La gestion des parcours : le CV certifié pourra être utilisé pour étoffer les données utilisées pour établir le graphe de compétences d’un collaborateur. Mais ce dernier outil se fonde sur de nombreuses autres sources (lettres, profil linkedin, échanges…), et s’inscrit dans une conception beaucoup plus opérationnelle des compétences. Il permet de formuler des propositions de parcours, d’identifier des lacunes de compétences et de proposer les formations correspondantes.
  3. La gestion des talents, à l’échelle de l’organisation : là encore, le passeport de compétences permet de « sécuriser » certaines informations-clés relatives aux compétences disponibles dans l’entreprise. Mais cela ne suffit pas : le déploiement du skills graph permet de compiler et d’analyser l’ensemble des données disponibles relatives à l’organisation entière, de faççon beaucoup plus fine qu’en se contentant d’utiliser les CV. Il permet également de préciser les descriptions des postes existants et en création, et de mettre en regard les profils de compétences des collaborateurs. A terme, l’IA devrait même pouvoir assister la décision stratégique RH et anticiper les besoins de compétences avec plusieurs coups d’avance !

Le passeport de compétences constitue donc à la fois une opportunité et un risque. L’opportunité, c’est celle de disposer pour chaque candidat et collaborateur, avec son accord, d’une source fiable et certifiée des éléments « attestables » du parcours professionnel et de formation. Le risque, c’est celui d’une revalorisation du diplôme et des savoirs « officiels » au détriment d’une logique de compétences plus fine et plus opérationnelle, celle des outils d’IA et des professionnels RH. Une seule chose est certaine : dans les mois qui viennent, le passeport de compétences va devenir un élément incontournable du paysage des RH en entreprise.

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