Billet de blog
la formation comme investissement ou depense
En théorie, l’affaire est entendue : l’entreprise qui achète de la formation pour ses collaborateurs investit pour son avenir et son développement. En pratique, la question n’est pas si simple. Le système de formation français, certes, encourage depuis peu une logique d’investissement. Mais d’un point de vue managérial, toutes les entreprises ne « vivent » pas la dépense de formation de la même manière. Et en matière de comptabilité, le poste « formation » reste pour une large part rattaché aux charges – mais pas uniquement. L’investissement formation relève-t-il donc du rêve ou de la réalité ? Nous proposons 3 angles de réponse : institutionnel, managérial et comptable.
L’angle institutionnel : comment encourager la dépense de formation ?
En France, l’Etat promeut la dépense de formation des entreprises depuis au moins un siècle : la taxe d’apprentissage remonte à 1925, la contribution à la formation professionnelle à 1971. Le système a longtemps fonctionné sur une logique d’obligation de moyens : un niveau minimal de dépenses était demandé (1,6% de la masse salariale). Si les entreprises ne justifiaient d’un effort de formation à hauteur de ce pourcentage, elles devaient payer la différence. Ce mode de fonctionnement incitait à former pour former, et mettait l’accent sur la dépense plus que sur le résultat.
Avec les réformes de 2014 et 2018, ce principe a disparu (pour les entreprises de 50 salariés et plus). Dans le même temps, un système de certification de la qualité des formations, Qualiopi, a été mis en place. La définition de la formation s’est élargie, intégrant notamment la formation à distance. L’idée générale était de libéraliser le marché de la formation, et de remplacer l’obligation de dépense par une culture de l’investissement dans les compétences.
Nombre d’entreprises, bien sûr, n’ont pas attendu cette évolution des institutions pour aborder la compétence comme une ressource stratégique, et la dépense de formation comme un investissement d’avenir. Mais le fait de ne plus devoir organiser son service formation autour des contraintes réglementaires a nécessairement changé les processus et donc les façons de faire.
La puissance publique cherche également à stimuler et à orienter la formation des salariés par la voie de la subvention. Les aides importantes à l’apprentissage consenties depuis la crise sanitaire sont l’exemple le plus probant : ce sont des aides directes et simples d’accès, fortement incitatives, qui se sont traduites par des résultats spectaculaires. D’autres aides, plus ciblées, ont eu moins de succès en raison de leur complexité, en particulier les aides visant les reconversions professionnelles.
Même s’il reste encore un peu d’instabilité réglementaire dans le domaine de la formation, on ne peut nier que le cadre institutionnel est devenu beaucoup plus propice à l’initiative et à l’esprit d’investissement au cours des 10 dernières années. Cela a sans doute joué dans le développement spectaculaire de la formation digitale à distance depuis la crise sanitaire.
H2 L’angle managérial : comment valoriser le capital humain ?
L’idée que les collaborateurs et leurs compétences sont au cœur de la performance de l’entreprise s’est imposée comme une évidence dansles entreprises, par la force des choses. Il en découle une nouvelle organisation de la formation : celle-ci doit désormais pouvoir atteindre tous les salariés, de façon personnalisée. Cet apparent paradoxe de l’individualisation massifiée est rendu réalisable par le digital. Le LMS est cet instrument qui peut à la fois amener la formation du centre vers les 4 coins del’organisation, tout en permettant l’émergence de contenus de pertinence locale et l’adaptation des contenus aux différents publics et aux individualités.
H3 Pour le manager : quel retour sur investissement ?
Dans cette nouvelle organisation, le management joue un rôle fondamental. C’est lui qui va identifier les besoins de compétences de l’équipe et leur trouver une réponse ; c’est lui également qui organisera la diffusion des formations « groupe » auprès de ses collaborateurs. C’est lui, enfin, qui a la capacité d’utiliser l’investissement formation comme moyen d’accroître la performance collective et l’empowerment individuel – deux objectifs étroitement liés.
Dans la logique du manager, la dimension « investissement » de la formation relève de l’évidence. Il dispose de ressources définies pour améliorer les compétences de son équipe, et il doit les allouer de façon optimale. Quand il achète de la formation, il attend, concrètement, un retour sur investissement – même si celui-ci n’est pas toujours précisément mesurable.
Quels freins à la formation comme investissement ?
Si les freins réglementaires ont pour la plupart été levés, il existe d’autres obstacles, organisationnels, au plein déploiement de la logique de l’investissement formation. Citons-en 3 principaux :
- La formation est souvent perçue, par les managers et les dirigeants, comme un investissement risqué et volatil : le salarié que l’on vient de former peut très bien quitter l’entreprise et mettre ses nouvelles compétences au service de la concurrence. Il est important d’inverser la perspective : la formation fait partie des outils majeurs de fidélisation des salariés, un levier que l’on ne peut pas se permettre de négliger en période de difficultés de recrutement.
- Le flou autour du retour sur investissement, que nous venons d’évoquer, peut donner l’impression d’une dépense mal maîtrisée, et générer des réflexes de fatalisme : dépensons toujours, on verra bien. C’est pourquoi dans le domaine de la formation, on parle plus volontiers de « retour sur attentes » (return on expectations, ROE) : il revient au manager de définir les indicateurs (les attentes) en fonction desquels on mesurera l’efficacité de la formation. C’est tout l’enjeu de l’évaluation de la formation, un sujet étroitement lié à la notion d’investissement formation.
- La formation est parfois vécue, sans que ce soit formulé de cette façon, comme un coût caché du processus de recrutement. Au-delà de l’onboarding, qui représente en lui-même un apprentissage, l’adaptation des compétences du nouveau collaborateur à la culture et aux procédures de l’entreprise requiert un effort significatif de formation. Là encore, il s’agit d’un investissement, et d’un investissement essentiel tant à la qualité de l’expérience candidat qu’à la réussite du recrutement. C’est l’un des nombreux contextes dans lesquels le fait de disposer en interne d’une vaste offre de formation digitale avec des contenus variés et personnalisables représente un atout décisif.
Globalement, approcher la formation comme un investissement apporte trop d’avantages pour que ces quelques obstacles ne soient pas surmontés.
L’angle comptable : comment comptabilise-t-on les dépenses de formation ?
Mais l’investissement, ne l’oublions pas, est avant tout une notion comptable. Qu’est-ce que le service financier a à dire sur le sujet ?
A l’époque de la réforme de 2018, certains acteurs de la formation militaient pour que les dépenses de formation puissent être déclarées comme investissement, et donc bénéficier du régime de l’amortissement. L’Autorité nationale comptable (ANC), saisie du sujet, avait rendu un avis qui s’est imposé depuis dans les normes comptables :
- La dépense externe de formation, pour l’essentiel, reste une charge, à déclarer au poste « rémunération d’intermédiaires et honoraires » ;
- Avec une exception : lorsque l’entreprise investit dans un matériel ou un logiciel, la formation des collaborateurs à son utilisation peut être, au choix, comptabilisée comme une charge ou comme un investissement.
Lors du déploiement d’un nouveau LMS, par exemple, la dépense afférente à la formation des collaborateurs, dans la mesure où elle est « nécessaire à la mise en service » de l’outil, peut donc être comptabilisée comme un investissement.
Symboliquement, le fait de pouvoir inscrire une partie de la dépense de formation à l’actif du bilan est loin d’être neutre. Il revient cependant aux services financiers de décider laquelle des deux méthodes est la plus avantageuse (entre la déductibilité des charges et la possibilité d’amortir l’investissement).
Les acteurs de la formation auraient souhaité que l’ANC aille plus loin dans la démarche. En guise de compensation, et pour montrer qu’elle avait entendu la demande, l’autorité a précisé que la dépense de formation pouvait être détaillée en annexe des comptes. Une façon de mettre en lumière, à l’attention notamment de potentiels investisseurs, la stratégie de développement des compétences et la valeur qu’elle apporte à l’entreprise aujourd’hui et demain.
Quels que soient les termes utilisés et les réalités comptables, la dépense de formation contribue indéniablement à préparer l’avenir de l’entreprise. Sans elle, pas de perspective à long terme. Toutes les initiatives qui contribuent à rendre l’organisation apprenante, à généraliser et à simplifier l’accès à des contenus variés et personnalisables, relèvent d’une logique d’investissement. Les plateformes de formation digitales permettent aujourd’hui de systématiser cette logique tant à l’échelle de l’organisation dans son ensemble que dans ses filiales, ses services et pour ses collaborateurs individuels. L’entreprise et ses collaborateurs sont entrés résolument dans l’ère de l’investissement formation, qu’on le comptabilise en heures ou en euros.
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